Je ne me souviens plus précisément des dates de mon mandat comme président de notre Association, si ce n’est que c’était au début des années 1970. Et il ne m’a fallu que peu de temps pour réaliser que c’était une tâche exigeante dont je ne pourrais pas m’acquitter sans l’aide compétente de notre personnel d'Ottawa. 

Nous traversions alors une période d'effervescence, tant au pays que dans le monde, et celle-ci a influencé le développement continu du service social. Au pays, la profession accordait une grande importance à la question du bilinguisme qui suscitait alors beaucoup d'intérêt. On prenait aussi conscience des défis que posait l’immensité du Canada au sein duquel il existait des liens étroits entre nous en raison de ce que nous avions en commun; il fallait pourtant que les provinces s’adressent de manière spécifique et unique à certains enjeux importants découlant des différences existant aux plans régional et provincial.

Plusieurs enjeux chevauchaient les champs d'intérêt et de compétence du fédéral et des provinces, notamment la question de la reconnaissance législative de la profession et les questions connexes afférentes à un contrôle de la profession qui soit fondé en droit. Si importante qu’ait été cette question d'une perspective nationale, il était clair, qu’en matière de partage des pouvoirs, le contrôle des professions demeurait de compétence provinciale. 

Cela a mené à une compréhension de plus en plus claire du fait que, pendant que nous cherchions une reconnaissance législative et un certain contrôle de la profession, chacune des provinces avait à adopter des lois qui répondraient le mieux possible à ses besoins eu égard aux défis à relever, à son histoire et à ses intérêts. Il est aussi devenu de plus en plus clair que nombre d'autres questions liées aux politiques sociales et aux services offerts par les provinces exigeaient que la profession soit en mesure d'agir de manière manifeste et distincte d'une perspective provinciale.

Au moment où j’ai accédé à la présidence, il était évident qu’il nous fallait doter la profession d'une structure organisationnelle différente, soit une structure qui permettrait toujours que soient assumées les responsabilités importantes d'une association nationale, tout en préservant l’histoire de la profession dans chacune des provinces et en tenant compte des besoins distincts exprimés dans chacune.

Il m’aurait fallu consulter les procès-verbaux de cette époque pour être en mesure de discuter plus précisément du processus et des enjeux liés à ce changement de structure. Ce dont je me souviens, c’est que le besoin de nous réorienter dans cette direction n’a suscité que peu de querelles, si ce n’est celle liée à une espèce de crainte nostalgique selon laquelle l’ACTS et son rôle traditionnel seraient affaiblis au fur et à mesure que nous progresserions vers l’implantation d'une structure provinciale. On a plutôt mis l’accent sur la forme que devrait prendre une telle organisation si l’on voulait pouvoir agir d'une perspective provinciale quand cela serait nécessaire et en tant qu’entité nationale lorsque cela s’imposerait. Au nombre des éléments appuyant la nécessité de maintenir une structure nationale énergique, il y avait l’importance croissante du service sociale sur la scène internationale et le rôle clé du Canada à cet égard.

En bout de ligne, à l’issue d'innombrables heures de réunions et de discussion, nous sommes parvenus à convenir d'une structure. L’adoption de cette nouvelle structure pour notre profession a marqué notre passage à un nouveau chapitre important de l’histoire de la profession.

Beaucoup d'autres enjeux professionnels ont été portés à l’attention du conseil d'administration à cette époque, mais celui dont je me souviens le mieux, c’est celui qui a mené à l’élaboration de la nouvelle image de notre profession. Je suis heureux et honoré d'avoir pu y contribuer en ma qualité de président.

Francis J. Turner, 

Professeur émérite, Faculté de travail social, Université Wilfrid Laurier